L’impensable / The Unthinkable / Den blomstertid nu kommer (Victor Danell, Suède, 2018) : avis d’un givré

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Alors que la Suède subit une attaque mystérieuse supposée terroriste, Alex est forcé de retourner dans son village natal. Il y retrouve Anna, son amour de jeunesse, ainsi que Bjorn, son père qu’il n’a plus vu depuis plusieurs années. Ensemble, ils devront renouer les liens brisés afin de survivre dans un pays plongé dans le chaos… en attendant le prochain assaut.

Inimaginable !

J’ai déjà évoqué ce film et . J’en attendais peut-être trop, toujours est-il que pour ma pomme voilà une bien cruelle déception. Question mise en scène, jeu d’acteur, vfx, optimisation du budget etc : RAS, c’est du bon, mais alors je ne m’explique pas ce scénario indigent ni cette narration catastrophique. Les p’tits gars de ce collectif suédois Crazy Pictures ont auparavant pondu un max de court-métrages gonflés, imaginatifs, rythmés – checkez la toile – avant de passer à ce long qui ne leur ressemble aucunement. Prépondérance pénible de la nation, 1er degré constant très balourd, poncifs dramatiques, etc : tout s’enchaîne salement. Et on ne décèle aucun humour à l’horizon, ce qui est un comble pour cette équipe que je n’avais pas hésité à comparer aux Monty Python suédois aux vues de leurs travaux !

La narration s’empêtre dans les différents points de vue, nous gratifie d’une mise en place aussi longue qu’éprouvante, peine à agencer les progressions parallèles d’un père et de son fils, nous colle sa première scène d’action sur un autre personnage, une ministre, dont à cet instant on se fout éperdument (!) Enjeux foireux, ennui gênant, générique de fin libérateur… Aïe, en voilà  un sacré nanar ! Mais pourquoi diable ont-ils choisi la difficulté du canevas choral ? Pourquoi vouloir à ce point singer Roland Emmerich ? Allez, c’est évident, peut-être sans doute ce film est-il une énième carte de visite qui ne s’adresse pas au public, mais à Hollywood. Si c’est le cas – le Prix du jury à Gerardmer me donne tort – ok les gars, faites vos trucs dans votre coin, mais attention : beaucoup de spectateurs ne cautionneront pas le CV. Ni les distributeurs à l’usure.

War Dogs – The Killing Machine (Björn Carlström, Daniel Hübenbecher, Suède, 1987) : avis d’un givré

« The story of the tragedy of violence », dixit cet hypocrite de gros bourrin de scénariste.

Rex, attaque !

Petit budget optimisé à fond les grenades, ce très offensif War Dogs eut une bonne carrière DTV en Angleterre en son temps. Il rappelle les débuts de Roberto Rodriguez avec son El Mariachi qui, à l’époque, m’avait bien emballé. Son ton décalé, potache, que n’a pas ce très sérieux WAR DOGS ! (grrrrrr…), arrondissait les angles, un peu trop anguleux chez le suédois. C’est très carré tout ça, surtout avec ce proche format 4/3 à géométrie variable. Quelques bandes noirs éparses trahissent quelques changements de format de ci de là. Tant pis, on garde ! Du fait du 1er degré assumé, la touche nanar tourne à plein régime – de grenades – grâce à des tronches qu’on ne voit nulle part ailleurs, des faux raccords à la pelle, des acteurs à la ramasse, des types qui portent des lunettes de soleil la nuit, un montage foireux mais, heureusement, dynamique ; de tout cet ensemble typique qui provoque régulièrement de belles crises d’hilarité aux dépends du film.

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Z’avez déjà vu Phil Collins avec des poils ?…

Rayon action, ça a vieilli mais reste encore largement généreux sur plusieurs morceaux de bravoure aussi poilants qu’impressionnants. Le début – cf. vidéo ci-dessus – tue des gosses aux ralenti autour d’une ice cream portée là en guise de clin d’oeil au Assault de John Carpenter, une fausse fin nous gratifie d’une longue poursuite hargneuse en bagnole, bien chorégraphiée avec tout plein d’explosions et des chouettes cascades, puis d’un duel à la Sergio Leone avec des lance-grenades en lieu et place de flingues. Ça cite Terminator en mode exponentiel à tour de gros bras et annonce surtout le Universal Soldiers de Roland Emmerich avec ces même guerriers construits pour mieux résister et mieux tuer. Cela étant, l’air du temps n’est pas le même ; à l’heure où j’écris ces légèretés la guerre fait rage comme rarement dans le monde (en Palestine, en Syrie, en Ukraine… ça se rapproche!) et de voir un gosse se faire mitrailler au ralenti n’est pas juste fun et provoc’, c’est un peu inapproprié. Le cinéma est affaire de palliatif donc toujours contextuel mais soit, embrayons (…)

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KABOOM ! Format 1 en haut, format 2 en bas.

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(…) le tout se termine sur un suspens familial très glauque, 20 minutes de trop sans doute là histoire de boucler une carte de visite tout-en-un pour leurs auteurs qui lancèrent des bouts de carrière avec ça. Ils en bavèrent pour pondre ce film, ce qui se voit et paye bien sur l’énergie générale, une certaine générosité partagée qui fait qu’au bout du compte ça défouraille plus et mieux que dans un The Ninja Mission, film signé Mats Helge Olsson dont l’esprit chargé de velléités militaires évidentes – et d’opportunisme adéquat – hante cette curiosité assez stupéfiante. War Dogs, que ça s’appelle. Grrrrrr !!! Couché.

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Vous n’auriez pas vu passer Sarah Connor ? Je ne vois rien avec ces lunettes…

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Alors : une jambe là, un bras ici… où est la tête ?

 

Blood Tracks – Les entrailles de la nuit (Mats Helge Ollson, Suède, 1985) : avis d’un givré

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Un groupe de rock suédois, Solid Gold, s’en va tourner un clip dans la montagne. Ses membres – qui vont les perdre – dérangent les habitants plutôt sanguinaires d’une usine désaffectée…

Une grosse choppe de bière avant de monter sur scène, ça enlève le blood trac !

Avez-vous trop chaud en cette canicule estivale ? Moi oui, aussi cherche-je à me rafraîchir devant un film nordique. De la neige, des meurtres, des jolies nanas coiffées dans l’air d’antan : roule pour LE slasher suédois des 80’s, Blood Tracks ! Chef d’œuvre méconnu du genre, ce fi… non, ne soyons pas bêtement auto-corporate, c’en est un beau de nanar, en effet. « Atrocement nul et très divertissant » dixit Daniel Ekeroth dans son bouquin Swedish Sensationfilms, une bible pour un blog comme Les givrés. Parce qu’il faut voir – et entendre – ce groupe de hard rock 80’s Easy Action chanter « Blood Tracks » dans la neige au milieu des montagnes, avec à ses côtés quelques groupies en petite tenue littéralement gelées ; il faut reluquer cette fille à oilpé qui s’extrait leeeentement d’une voiture coincée par une avalanche ; il faut apprécier à sa juste valeur – zéro ? – ce plagiat pourri, outre celui évident de La colline à des yeux (pas pour voir tout et n’importe quoi non plus), du Blow Out de Brian De Palma le temps d’une recherche de sons étranges à l’aide d’un micro dans une usine, à l’inverse de moi, désaffectée. Et il faut savoir apprécier le jeu des membres du groupe, a priori tous bourrés plus ou moins de force par le réalisateur MatsThe Ninja MissionHelge Olsson afin qu’ils jouent mieux. Ou moins mal, peut-on lire dans les notes « Trivia » d’IMDb.

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J’ai un truc qui me pique dans le dos, là…

A tout ce petit monde de se faire massacrer par les rednecks du coin, tous plus sympathiques que nos hystériques touristes. La présence de ces dégénérés (tout est relatif), alliée à la musique très efficace de Dag Unenge (The Ninja Mission, War Dog), un bon travail au son et quelques scènes gores pas dégueulasses – si, justement ! – participent d’une ambiance particulière qui, elle, ne relève pas du navet. Pas fier quand même, le guitariste Kee Marcello quitta le groupe par la suite pour rejoindre Europe (The Final Countdown) tandis que moi m’en vais cacher mon dvd import suédois de daube je ne sais où. Le format est plein cadre alors que c’est du scope mais les scènes gores restent à peu près (?) intactes là où la vidéo intégrale visible sur Youtube est ultra censurée. Y-a-t-il des limites au complétisme, je vous le demande ?

Dossier Ninja ! The Ninja Mission (Mats Elge Olsson, Suède, 1984) featuring Norwegian Ninja (Thomas Cappelen Malling, Norvège, 2010) : avis d’un givré

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Here comes the nordic ninja ! The Ninjordic ! The Nordinjac !

The Ninja Mission : La CIA, le KGB et des ninjas sont pris dans une spirale de violence au cœur de la Russie.

Norwegian Ninja : Durant la Guerre Froide, la Norvège a trouvé un moyen imparable pour protéger sa neutralité: une troupe d’élite entraînée selon les principes millénaires des ninjas. Ces guerriers devront user de leurs plus extraordinaires pouvoirs pour vaincre un rival légèrement facho. Perdu quelque part entre Opération Dragon et La vie aquatique, voilà une comédie d’action totalement délirante, kitsch et loufoque à souhait.

Vous aimez l’action ? Vous aimez les films ? Vous aimez les films d’action ! Vous aimez les ninjas ? Vous aimez les missions ? Vous aimerez The Ninja Mission ! Dans les années 80, le suédois Matts Elge Olsson pondit avec entrain toute une série de films d’action ayant paraît-il la particularité de bien souvent relever du gros nanar. Celui-ci date de 1984 et, de l’avis de certains, voilà son chef d’œuvre. Tout est relatif dirons-nous, mais en effet le film surprend. Généreux, Ninja Mission balance des shurikens, tire dans tous les sens et ok, les potes dépotent du despote et pas seulement avec du desktop. Sabres, kicks, guns, tout y passe. Tout autour, par contre, c’est le néant. Scénario abscons comme la lune, acteurs assez légers et influence flagrante du Terminator de James Cameron autour. Le look Michael Biehné du héros et une scène de défouraillage au milieu d’une joyeuse fête ne laissent pas de doute à ce sujet. On frôle le nanar par endroits mais l’amateur de douilles fumantes et de ralentis sanglants – et gores – est servi chaud. De là à dire que l’objet est bon, il y a un pas furtif que je ne ferai pas. Les métrages US de la Cannon de l’époque, bien que pas toujours folichons, lui restent supérieurs, c’est dire le niveau. Cela étant, la tonalité qui diffère du tout venant, l’influence de l’Asie à peine évoquée au profit de techniques de commando militarisantes voulues les plus crédibles possibles, le premier degré appuyé, des scènes nocturnes réussies et le respect d’un genre aidés par une musique 80’s très sympa emportent l’adhésion. Ils font de cette péloche une séance action nanardesque mais qui tient le coup. Olsson en réalisa d’ailleurs une suite non officielle deux ans plus tard, elle porte le doux nom de Eagle Island.

Un an plus tôt, en 1985, en Norvège le diplomate Arne Treholt fut accusé de haute trahison et d’espionnage. Déjà présenté chez les Givrés et, la grosse comédie Norwegian Ninja (Kommandør Treholt & Ninjatroppen) use de l’uchronie pour raconter cette histoire délirante à prendre au moins au 3ème degré. « Et si… ». Partant de ce postulat, aux auteurs de se lâcher et de flinguer tous azimuts. Sur un mode potache, la fiction rejoint l’absurdité de la réalité et ce mensonge, qui avoue en être un, souligne que ce que nous croyons la réalité nous est communiqué par des informations et autres instituts de sondages qui en balancent de bien plus gros encore. Au réalisateur Thomas Cappelen Malling d’inventer une forme de joyeux négationnisme, non pas pour vanter telle ou telle politique mais plutôt pour prôner la paix, conseillant à tout un chacun de garder ses distances vis à vis de médias qui parfois créent, indirectement, du drame, du bellicisme, de la violence, sans jamais en assumer la moindre responsabilité. Le métrage fut tourné en 2010. En juillet 2011 survint le tristement célèbre massacre sur l’île d’Utoeya, en Norvège. Étonnement, au lieu de faire passer Norwegian Ninja pour un film indécent parce qu’il évoque, en amont du drame, un attentat à la bombe à Oslo, il renforce son propos, sa pertinence. Malaise il y a mais le message passe encore mieux, la comédie en devient davantage grinçante. Du moins, elle fonctionne très bien jusqu’aux trois-quarts du métrage où là, comme d’habitude dans ce type de projet, le dernier tiers se met à pédaler un peu dans la semoule. L’imagination se tarie ou, c’est aussi possible, une autocensure, un allègement du foutage de gueule et un (faux) retour à un patriotisme pourtant moqué tout du long fut plus ou moins imposé, conseillé. Car ne nous y trompons pas : Treholt est bien décrit dans ce film comme un enfoiré de première, le gourou d’une secte obscure qui n’hésite pas à sacrifier ses meilleurs éléments pour sauver sa peau. Au patriotisme de n’être alors qu’un énième fond de commerce avoué.

Le rythme évolue cahin-caha mais n’empêche pas les scènes cultes de s’enchaîner : la description du quotidien de nos ninjas dans leur camp hippie où l’on ne voit pas de femmes mais des chèvres, beaucoup de chèvres, vaut le coup d’œil. L’affrontement de deux ninjas au sommet d’une montagne est jubilatoire à suivre, et l’histoire hilarante des vikings s’en allant à la pêche aux moules m’a fait franchement pleurer de rire. Même si le film ne tient pas la distance – c’était prévisible – voilà une bonne poilade qui fait du bien en ces temps de trop plein de sérieux affiché un peu partout, crise économique et campagne électorale obligent plus ou moins. Je pensais vraiment que l’humour autre que les sempiternels mêmes sujets apolitiques qui ont actuellement le vent en poupe ne pouvait pas être vraiment appliqué dans ce contexte, qu’un Coluche, même lui, fatiguerait à force de répéter les mêmes vannes. Mais ici l’ironie est poussée dans ses derniers retranchements avec ce film en forme de blague qu’aurait pu se raconter des résistants au fond de leur trou pour entretenir leur idéalisme. Ca marche, c’est frais, ça soigne. Pas si potache que ça finalement, voire d’utilité publique. L’humour y est jaune mais efficace. Humour jaune ? Le ninja est d’origine japonaise, ne l’oublions pas !

Dans cette continuité asiatique, je ne saurais d’ailleurs trop vous conseiller le dossier pas loin d’être exhaustif (si, si) qu’on avait écrit à plusieurs mains expertes (évidemment !) sur Cinemasie.com.

The Ninja Mission : 08/20

Norwegian Ninja : 12/20

Merci à l’éditeur Elephant Films d’avoir eu l’amabilité d’envoyer le DVD Norwegian Ninja à la rédaction. 

Born American ; Jäätävä polte (Renny Harlin, Finlande, USA, 1986) : avis d’un givré

Un finlandais à l’ouest

En pleine Guerre Froide, trois étudiants américains franchissent pour s’amuser la frontière entre la Finlande et l’URSS. Pris à parti par l’armée soviétique, ils sont emprisonnés et se retrouvent plongés en plein cauchemar…

J’ai longtemps cru que le premier film de notre bourrin finlandais préféré était le très sympa petit film d’horreur Prison, alors avec le tout jeune fils d’Arathorn. Encore loin d’incarner Aragorn dans la trilogie du Seigneur des anneaux, le semi danois par son père Viggo Mortensen, qui nous vient donc un peu plus du nord que des terres du milieu, avait en effet bien du chemin à faire. Et il est beau le chemin, ça roule. Par contre, Harlin, de son vrai nom Renny Lauri Mauritz Harjola (merci IMDb), faut voir.

En suivant tous ces réalisateurs nordiques qui pondent un film « ticket » dans l’espoir de se faire héliporter jusqu’à Hollywood (Espinoza : ayé, Wirkola : fait, Refn : okidoki, Kormakur : done, Sletaune : en stand bye), je me suis dit qu’il en avait forcément lancé un, lui aussi, d’appel de phare. Un appel de phare ? L’image est légère ! Après avoir difficilement ingurgité la bête, à savoir une énorme boite familiale de cassoulet bien gras  long à descendre dans le gosier, on est en droit de voir là une fusée éclairante en forme de gros feu d’artifice, un spot dans la gueule balancé à bout portant dans une sale d’interrogatoire ou encore un seau d’eau jeté violemment à travers la tronche. Le message est on ne peut plus clair : « Ohé les gars ! Je veux aller bosser en Amérique ! Z’avez captés ?!».

Pour ça, Renny mit le paquet. Déjà, le titre, Born American, annonça la couleur. Pour la suite, je cite et traduis le Wikipedia anglais : « en ce temps là acheteur pour le compte d’un distributeur finlandais, il (Renny) rencontra le producteur et scénariste Markus Selin au cours d’un voyage à L.A. Les deux finlandais devinrent amis et collaborateurs. Ils se mirent rapidement au travail sur un script pour leur premier film, Born American (…) Chuck Norris devait originellement incarner la tête d’affiche mais il se retira des suite de difficultés rencontrées quant au financement. Son fils, Mike Norris, prit le relais. A cette époque film le plus cher jamais tourné en Finlande, il en fut d’abord bannit des écrans parce qu’il encourageait la violence et dressait un portrait haineux des russes. Le succès international du film ouvrit les portes d’Hollywood à Harlin. »

Markus Selin est sans nul doute un producteur avisé. Scénariste, par contre, n’exagérons rien. Comment est-ce en effet possible d’écrire à quatre mains un tel ramassis de bêtises ? Ça se tient, en fait. Si, ça se tient. C’est le concept, d’abord, qui fut réfléchi. Au milieu des années 80, quel était le grand ennemi des américains au ciné ? Le ruskov. Sur quel film pouvait-on surfer pour remporter le pactole et se faire bien voir ? L’aube rouge de John Milius date de 1984, pour rappel un film (un peu) moins con que celui de Harlin (1986) dans lequel une bande de jeunes patriotes font face à une invasion de rouges. Renny décida de faire pire en jetant carrément quelques américains en Russie. Composé de gros bouts de Voyage au bout de l’enfer et de Midnight Express dedans, leur cassoulet tiède fut doublé d’une péloche certes irresponsable mais, avouons-le, pleinement opportuniste.

« Succès international ». La mention interpelle parce que presque rien ne fonctionne dans ce bidule. Le début laisse pourtant augurer de belles choses. Les trois amis sont présentés comme des andouilles d’américains mais s’avèrent sympathiques dans leur comportement jeune et insouciant. Malheureusement, une fois la frontière passée le scénario débite le pire du pire. Exploser presque gratuitement un prêtre orthodoxe à coup de flèche et de fusil, il fallait oser ! Ajoutons (soustrayons) une star imposée, Mike Norris, qui cassa un peu plus la chose en ramenant toutes les grenades à lui et l’on obtient un nanar 80’s indéfendable. Les deux copains, pourtant beaucoup plus charismatiques que le fils Norris, sont évincés en bout de course au profit d’un bouquet final à la Rambo consternant. Il faut reconnaître que Renny Harlin sait faire péter des trucs et filmer correctement une scène d’action, en soit une démonstration qui dut plaire à des américains qui, pourtant, le firent passer par la case horreur (Prison, donc, et le quatrième épisode de Freddy) avant de lui confier des explosifs et de la neige artificielle sur 58 minutes pour vivre.  Sa « traque au sommet » du drapeau US se termina avec le très fun Cliffhanger, encore une accroche neigeuse. « Embauchez-moi les gars, je sais tourner des films d’action dans des conditions hardcore ! » semble-t-on comprendre. C’est sur le CV. Sa filmographie « décevra » par la suite. La faute en incombe au célèbre gouffre financier de L’île au pirates et, plus généralement, à une suite de prises de risques qu’il prit pour une femme, alors sienne, Geena Davis. Si Au revoir à jamais reste en ce qui me concerne son chef d’œuvre, avouons que tout est relatif et remercions pour ce métrage le boulot du scénariste Shane Black (Le dernier samaritain) et Samuel L. Jackson dans l’une de ses toutes meilleures prestation et l’un de ses meilleurs rôles. Depuis c’est plutôt bof pour Harlin, même s’il conserve un esprit fun très plaisant sur Peur bleue et surtout un Profession Profiler sur lequel j’assume un gros (gros) plaisir coupable. Tout comme Mike Norris, le film Born American s’est fait oublier. A raison, mais sur une telle filmographie il reste intéressant. Et cohérent.

 

Cold Prey 3 ; Fritt Vilt 3 (Mikkel Brænne Sandemose, Norvège, 2010) : avis d’un givré

Un prequel expliquant les origines obscures du tueur qu’a affronté à deux reprises Jannicke.

07/20 – Mauvaise pioche

Avec l’âge j’ai appris, je crois, à éviter de débiner trop facilement un film. Dégommer en quelques lignes et en  quelques heures (minutes) à peine un travail que beaucoup de personnes mirent des mois à construire, c’est assez minable au demeurant. Certes, mais nous balancer un produit comme celui-là à la tronche, c’est quoi ? Pas de neige, pas de cold, quelques proies, même pas de pioche et un mode automatique revival 70’s (encore !) assez piteux composent ce manque de respect flagrant envers tout un public ici assimilé à une bande de vaches à lait. De jeunes vaches, donc des veaux, qui regardent un énième « Norwegian woods movie » comme ils voient passer le train. Gaffe à ce que ce terme ne devienne pas péjoratif ! Permettez, je m’en vais brouter ailleurs. Pas de rythme, panne d’imagination comme une voiture tombe en rade au milieu de la forêt…

Avec comme clou enfoncé dans la franchise une scène (mal) pompée au très bon Détour mortel de Rob Schmidt on obtient ce « Cold Prey : les origines » consternant au « demeuré ». Cette saga n’existe que par son deuxième opus, avec comme pré-générique honorable le premier et comme annexe inutile, donc, ce triste machin. A enterrer près d’un arbre et à ne surtout pas marquer d’une pierre.

Hamilton (Harald Zwart, Suède, 1998)

04/20 – Hamilton en dessous !

« J’Hamilton » à le voir mais à la vue du résultat ça n’était pas si pressé. Ne blâmons pas toujours les distributeurs : ne pas sortir un nanar de ce calibre revient à se tirer une balle loin du pied, pour le fun et le pied de nez. Et ils en ont eu, du nez, car voilà un film raté qui, pourtant, avait tout d’alléchant sur le papier et à travers une bande-annonce remplie d’un espoir que j’avais exprimé dans ce petit avant-propos.

Je vais au plus court : narration catastrophique, mise en scène américanisée au possible tendance 90’s à la Michael Bay (en passant : la même année 1998 sortait son Armageddon, également avec Peter Stormare), scènes d’action courtes et ratées – toutes dans la bande-annonce – personnages à peine effleurés, nationalisme déplacé, Peter Stormare à l’ouest, scénario périmé… Non, vraiment, je n’éprouve pas l’envie de m’attarder là-dessus même si un comparatif avec la mini-série plus longue qui en a été tirée – et étirée – joue certainement en sa faveur. Mais ne perdons pas espoir pour autant, parce que si je n’attends pas grand chose de la nouvelle adaptation qui se profile de ce personnage créé par l’écrivain Jan Guillou, le métrage à venir de Tomas Alfredson, La taupe, devrait lui résonner quelques tons au-dessus rayon agents secrets. Au service d’une autre Majesté, cette fois.

Antichrist (Danemark, 2009) : avis d’un givré

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04/20 – Branlons-nous dans les bois, pendant que le loup y est pas…

… comment ça il y est ??

Le trip immersif, ça passe ou ça casse comme on dit. Là, ça casse. Pourquoi cela ? Soyons bref : parce-que.

– Pourriez-vous néanmoins détailler un peu votre argumentaire, très cher ?

Qui me parle ? Ah, Gollum, comment allez-vous ?? Pour vous c’est pas cher, il est cadeau ce p’tit argumentaire ! Même si l’envie je n’ai pas de m’étaler sur une œuvre qui s’étale bien assez comme ça toute seule.

La photo est belle, très belle, prête pour un beau déballage en HD. Le viscéral, quand c’est tout beau, ça ne passe pas. Vous imaginez un  Massacre à la tronçonneuse en HD vous ? Moi, pas.

La forêt, sensée inquiéter, procure l’effet inverse : on éprouve l’envie de s’y promener, d’y faire une randonnée entre amis, d’y marcher avec un attirail « Dékathlon » tout neuf en sentant sous sa chaussure la pomme de pin qui s’effrite, la branche d’arbre qui craque et la mousse qui s’enfonce. On veut toucher cette belle écorce, s’asseoir sur ce caillou, poursuivre ce chemin et respirer à pleins poumons l’air frais de la montagne. Cet endroit serait la forêt du diable ? Mais reprenez-vous que diable !!

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Un, deux : le petit pont de bois, le petit pont de bois…

Dans cette forêt, on y voit du super ralenti. Un ralenti à deux à l’heure ne provoque rien. Situé entre l’arrêt sur image et le ralenti de bon aloi (du Nicolas Roeg par exemple), le ralenti à deux à l’heure ne fait naître aucun sentiment à part celui, pressant, de hurler à Charlotte Gainsbourg de se magner le popotin et de le traverser fissa ce petit pont de bois ! Ce qui me fait penser (on a largement le temps de penser là-dedans) à la chanson de Yves Duteil. Quelqu’un peut-il m’expliquer en quoi Yves Duteil est viscéral ? PERSONNE ! Alors un petit pont de bois filmé à deux à l’heure…

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… le petit pont de bois, le petit pont de bois…

A l’orée de cette forêt se cache un renard. Ce renard-peluche en 3D qui parle et nous annonce que le « Chaos reigns » est d’un comique involontaire très réussi. Le loup en animatronic de L’histoire sans fin était autrement plus efficace. L’absurde règne, oui, et l’humour volontaire des Monty Python aussi, pas loin.

Au milieu de cette forêt – mais à la fin du film – se situe le dénouement. Trash, admettons, mais pour qui a vu un  L’empire des sens du japonais Nagisa Oshima, par exemple, ça reste de l’épate formelle et… et c’est ça, j’y suis : « Antichrist » relève de l’épate, sur la forme et sur le fond ! L’arbre plein de bras de l’affiche n’avait d’autre raison d’être que d’alimenter la promo sur le net avant la sortie du bidule. Il ne sert à rien cet arbre plein de gens dans le film. A rien. Et en ce qui concerne le fond… on le touche.

Quoi d’autre… Un couple Dafoe/Gainsbourg peu crédible, une chute de glands neuneu, beaucoup trop de blabla  (j’ai donné déjà)… Le tout aurait pu passer avec un traitement à la Dario Argento de la grande époque, celui qui faisait passer les pires débilités avec un sens du cauchemar hallucinant. Mais, en l’occurrence, faute d’immersion le spectateur prend trop de distance et, du coup, montre la chose du doigt en ricanant.

Il a sans doute dû arrêter de se droguer le père Lars. Ou alors il a commencé. Du coup il va mieux mais ça n’est pas le cas de son film. David Lynch arrêta de voir un psy le jour où ce dernier lui affirma que ses œuvres en pâtiraient si d’aventure il guérissait. A méditer ?? Lars Von Trier reste un bon, voir et revoir sa série L’hôpital et ses fantômes ou encore son superbement gonflé Dogville pour se convaincre que le fondateur du Dogme est tout sauf un manchot. Le prochain sera le bon, et ça m’ennuie, pour ne pas dire autre chose, de commencer notre rubrique « Scandinavets » par du Lars Von Trier, quand même !

Antichrist sur IMDb